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Un illustre inconnu : Réflexion fatale

Voilà un film que l’on aurait aimé défendre ne serait-ce que pour son postulat de départ passionnant sur la double réflexion de soi. La réelle, celle du matin devant la glace, et la fausse, celle que l’on renvoie aux autres le reste de la journée. De cette schizophrénie latente en chacun de nous, Un illustre inconnu a décidé de l’exacerber pour poser les bases psychologiques d’un homme qui ne supporte plus sa solitude et l’insignifiance de son reflet aux yeux des autres.

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Le problème c’est que le film de  Matthieu Delaporte ne traite jamais réellement son sujet soit par manque d’imagination, soit par manque de courage. Un illustre inconnu navigue dès lors très vite à vue entre une pincée de thriller ici, une once fantastique là et saupoudré de psychologies de comptoir tout du long. La faute aussi à une histoire plus que bancale qui confronte un homme jamais en phase avec son environnement contre lequel il se révolte en se faisant passer pour autrui. Pour visualiser la chose, le scénariste / réalisateur opte pour l’art du déguisement / mimétisme poussé à l’extrême. L’homme devient caméléon diluant ainsi un peu plus sa propre identité à chaque nouveau personnage qu’il endosse pour devenir un véritable inconnu.

C’est Mathieu Kassovitz qui endosse ce rôle d’ectoplasme multi facettes. Une belle gageure sur le papier et un personnage rêvé pour tout acteur qui se respecte. Saut que Kassovitz n’est pas un acteur. C’est un touriste qui a au mieux des notions de comédie. Celles qu’il a acquises au contact des acteurs qu’il a dirigés tout au long de sa carrière de cinéaste. Difficile dans ces conditions d’épaissir un personnage au demeurant mal « caractérisé ». Difficile d’y croire et impossible que l’entreprise trouve un aboutissement autre que l’échec.

Et pourtant voilà un film, un sujet, une volonté de proposer quelque chose de différent dans le paysage aseptisé actuel du cinéma français. À l’évidence, Matthieu Delaporte a bénéficié de l’extraordinaire succès du Prénom pour avoir le feu vert d’une telle production. Celle-ci est ambitieuse dans la forme où la photo anthracite et très travaillée donne une tonalité intrinsèquement riche au film. La mise en scène ample et sereine trahit aussi une production aisée, installée, à contresens du personnage censé être aux abois et de plus en plus en manque. Comme un junkie en recherche de sa dose de vie… par procuration.

Un illustre inconnu rate aussi le coche d’une belle réflexion de cinéma. De celle qui engage le spectateur dans l’aventure de la salle obscure et qui ne vient que pour endosser la personnalité du héros ou de l’anti-héros à l’écran. De cette schizophrénie là-aussi en arrière-plan mais assumée et ardemment désirée. De ce dédoublement de personnalité jouissif qui aide à appréhender la réalité d’une vie telle une thérapie de choc par l’image. En adoptant la posture visuelle sans aspérités des postiches et autres maquillages aussi réussis soient-ils, le film s’enfonce dans la farce et le ridicule d’une démonstration qui ne débute jamais. Un illustre inconnu ou un film au final sans identité.

Un Illustre inconnu de Matthieu Delaporte  – 19 novembre 2014 (Pathé Distribution)

Sébastien Nicolas a toujours rêvé d’être quelqu’un d’autre. Mais il n’a jamais eu d’imagination. Alors il copie. il observe, suit puis imite les gens qu’il rencontre. Il traverse leurs vies. Mais certains voyages sont sans retour.

Note : 1,5/5

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