Une nouvelle amie

Une nouvelle amie – Un Ozon en mode Sitcom

Pour ceux qui voyaient en François Ozon la caricature du réalisateur français embourgeoisé avec une propension à l’apostrophe sociale un peu facile devrait revoir leur jugement à la vision de cette Nouvelle amie. On y retrouve en effet l’artiste branque de Goutte d’eau sur pierres brûlantes, l’urgentiste démiurge de Sitcom et l’homme à fleur de peau de Sous le sable. Un triumvirat des sens qui emporte son nouveau film en des contrées peu explorées et on ne peut plus réjouissantes.

Une nouvelle amie - Affiche

Comme dans Sitcom Ozon fait en effet intervenir un événement extérieur pour provoquer la mue de ses personnages. Ici c’est la mort prématurée qui va perturber l’équilibre d’électrons qui se croyaient libres bien que déjà promis à une vie réglée.  Ils sont ceux qui restent sur le carreau et qui vont donc devoir palier chacun à leur façon cette absence injuste. Il y a d’abord l’amie d’enfance (incandescente Anaïs Desmoutier), la plus proche et la confidente avec qui les sentiments furent les plus pures mais aussi les plus troubles. Il y a l’époux (Raphaël Personnaz dans un rôle qui lui va comme un gant) qui sera accessoirement le dindon de la farce. Il y a enfin le veuf (Romain Duris dont la palette de jeu surprend encore et toujours) qui au-delà de la souffrance doit dorénavant gérer seul sa petite fille de quelques mois et qui pour ce faire va adopter une attitude pour le moins peu banale. En dire plus serait déflorer le film. Mais en dire moins ne serait pas lui rendre justice.

Insinuons donc tout de même qu’Une nouvelle amie peut se voir comme une très belle réponse (comprendre limpide) à ces mouvements anti mariages pour tous qui font flores en nos contrées depuis quelque temps. Il y est en effet question d’attirance pour le même sexe et de l’épanouissement de soi via le reflet de l’autre (partenaire, ami, amant, mari…). Des thèmes déjà abordés dans le cinéma de Ozon mais jamais comme ici avec autant de liberté, d’aisance et de rondeur. Aux antipodes d’un Jeune & Jolie qui ne déméritait pas mais dont  la raideur un peu dogmatique finissait par lasser. L’empathie d’Ozon ici envers tous ses personnages est patente. Elle traverse sa mise en scène qui en devient sincère et malicieuse sans jamais tomber dans la candeur sirupeuse qu’affectionne récemment le réalisateur.

De cet équilibre quasi miraculeux en sort un film raffiné et émouvant. On pense un peu aux mélos de Sirk qui faisait de l’acceptation de l’autre dans sa différence la thématique principale de sa filmographie. Ozon dont l’admiration pour Sirk n’est pas un secret, pousse simplement le curseur un peu plus loin en faisant tomber les préjugés sous nos yeux sans jamais se départir d’une certaine délicatesse de traitement qui rassurera en apparence la bourgeoise (et en amont les financiers) qui se serait égarée dans la salle.

Une nouvelle amie est ainsi fait qu’il n’est même pas un film sulfureux. Ozon n’a plus besoin de provoquer. Son cinéma en devient bien plus mature, passionnant et autrement plus profond. Une nouvelle voie plus qu’excitante qui mérite d’être scrutée de près.

Une nouvelle amie – 05 novembre 2014 (Mars Distribution)

RésuméÀ la suite du décès de sa meilleure amie, Claire fait une profonde dépression, mais une découverte surprenante au sujet du mari de son amie va lui redonner goût à la vie.

Note : 4/5

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