L'Enfer - Image une fiche film

Fiche film : L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot

L’Enfer, c’est l’histoire d’un homme, Marcel Prieur, patron d’un modeste hôtel de province, saisi par le démon de la jalousie. Au début du film, Marcel, un rasoir à la main, devant le corps allongé d’Odette, essaie de se souvenir comment il en est arrivé là. Sa jolie femme, Odette l’a-t-elle odieusement, scandaleusement, trompé ? Et avec qui ?

Dans une note d’intention, le réalisateur Serge Bromberg explique le mystère entourant ce film: « Ces images invisibles sont aujourd’hui auréolées d’une légende : le plus grand film du début des années 60, celui qui avait tout et dont on disait qu’il remettrait en cause jusqu’aux fondements du cinéma, a été tourné à huis clos dans une débauche de luxe, ne laissant derrière lui que des on-dit et des rumeurs. Que s’est-il passé sur le plateau ? Que cherchait Clouzot ? En 2005, l’exhumation de 185 boîtes de films est l’occasion de confronter les témoignages des survivants – tous devenus aujourd’hui des personnalités du cinéma – et tenter de mettre de l’ordre dans les pièces d’un puzzle dont le créateur ne connaissait peut-être pas les contours. »

L’Enfer a été récompensé par le César du Meilleur Documentaire en 2010.

L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot (2009)

Réalisateur : Serge Bromberg et Ruxandra Medrea
Acteurs :  Romy Schneider, Serge Reggiani, Bérénice Bejo, Catherine Allegret, Jacques Gamblin
Durée : 1h34
Distributeur : MK2 Diffusion
Sortie en salles : 11 novembre 2009

Résumé : En 1964, Henri-Georges Clouzot choisit Romy Schneider, 26 ans, et Serge Reggiani, 42 ans, pour être les vedettes de L’Enfer. Un projet énigmatique et insolite, un budget illimité, un film qui devait être un « événement » cinématographique à sa sortie. Mais après 3 semaines de tournage, le drame. Le projet est interrompu, et les images que l’on disait « incroyables » ne seront jamais dévoilées.
Ces images, oubliées depuis un demi-siècle, ont été retrouvées et elles sont plus époustouflantes que la légende l’avait prédit.

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  • Avis express : Quand en 1964 Clouzot met en branle L’Enfer, il est certainement le plus grand cinéaste français en activité. Pensez-donc, c’est que l’homme a derrière lui une filmographie impressionnante jalonnée d’œuvres définitives. On pense bien entendu à L’Assassin habite au 21 ou au Corbeau, tous deux réalisés alors que la France subit le joug de l’occupant nazi et qui restent plus que jamais aujourd’hui d’une noirceur subversive à nulle autre pareil. Que dire ensuite de Quai des Orfèvres sinon qu’il s’agit là de la meilleure réponse aux chefs-d’œuvre hollywoodiens de l’époque tendance film noir. Et puis il y a les deux summums que furent Le Salaire de la peur et Les Diaboliques dont on cherche toujours leurs pendants dans l’histoire du cinéma hexagonal. Avec L’Enfer, Clouzot change de braquet car il dispose d’une grosse écurie yankee à ses côtés (les majors hollywoodiennes investissaient pas mal en Europe à cette époque) et par conséquent de moyens financiers quasi illimités. Et il va donc voir les choses en grand à commencer par une préparation réalisée pendant 6 mois dans une suite du Georges V sur les Champs-Élysées. Il aura à sa disposition par la suite trois équipes de tournage à temps plein, la possibilité de se plonger dans des études formelles sans fin et engagera une star en la personne de Romy Schneider. Pourtant, l’histoire est somme toute des plus banales. Celle d’un homme de 42 ans (Serge Reggiani, autre vedette de l’époque) qui vient juste de se marier avec une femme beaucoup plus jeune que lui et qui sombre peu à peu dans une jalousie maladive et obsessionnelle. Les décors ne requièrent que peu de préparation puisque l’on filme cela au bord d’un lac au cœur du Cantal, au pied du viaduc de Garabit. Il y a là un hôtel pour vacanciers que tient ce couple nouvellement marié. En fait, ce qui va accaparer Clouzot c’est la question de la représentation de la folie à l’écran. Pour cela, le cinéaste passe par une série d’expérimentations visuelles et sonores qui vont prendre le pas peu à peu sur le film et le tournage lui-même. Tournage qui ne durera au final que trois semaines suite au retrait de Reggiani atteint d’une maladie « mystérieuse »  et quelque jour plus tard de Clouzot lui-même frappé par un malaise cardiaque.  Par la suite, les images tournées, soit 13 heures au total, feront l’objet d’une bataille judiciaire entre la veuve Clouzot (du vivant de son mari, celui-ci ne voulait plus en entendre parler) et la compagnie d’assurance du film qui n’avait pas apprécié qu’on lui cache la fragilité cardiaque reconnue du cinéaste. À tel point que L’Enfer était devenu une sorte de mythe. C’est la pugnacité et la passion avérée de Serge Bromberg qui ont permis d’exhumer les bobines et de faire découvrir des images extraordinaires en couleur (les passages où la folie se manifeste) et en N&B rappelant un peu le procédé adopté par Fuller pour Shock Corridor. L’occasion unique d’apporter la lumière sur un film maudit dont on n’a pas fini d’en sonder les mystères.  4/5SG
  • La chronique DVD / Blu-ray : L’Enfer date de 2009. Il fut d’ailleurs présenté à Cannes Classics cette même année et a remporté en 2010  le César du meilleur documentaire. C’est que Bromberg, outre son travail de recherche et de spéléologie cinéphilique classique, propose ici une magnifique thèse de cinéma qui allie certes le documentaire mais aussi film de fiction. En effet, tout en s’appuyant sur les rouages habituels du making-of, il utilise le scénario écrit par Clouzot comme plan général et use au maximum des séquences tournées afin de les insérer façon puzzle. En résulte une forme de patchwork riche et intelligemment montée qui fait la part belle aux expérimentations visuelles de Clouzot. Pour celui qui ne s’y attend pas, ce sera d’ailleurs un choc virginal tant les images dévoilées sont tour à tour hypnotiques, déviantes, monstrueuses de beauté et au final d’une atemporalité renversante. Romy Schneider y est renversante de beauté bien aidé sans aucun doute par un Clouzot en total pâmoison qui n’hésitait pas à répéter les prises à l’envie. C’est d’ailleurs pour cette raison que Reggiani a quitté le tournage, lui qui se prenait la foudre Clouzot à chaque nouveau tour de manivelle quand il ne devait pas courir à l’infini sur le fameux viaduc l’épuisant littéralement. On appréciera d’ailleurs de retrouver sur cette nouvelle édition augmentée (on y reviendra) le document signé Pauline Richard intitulé Ils ont vu L’Enfer qui permet d’aller encore plus loin dans la tentative de compréhension de cet échec mythique. Elle donne en effet la parole à des personnages vus dans le film de Bromberg mais qui ont plus le temps ici pour développer certains ressentis ou des anecdotes forcément incroyables. On citera sans être exhaustif Costa-Gavras, alors assistant réalisateur à la préparation, Catherine Allegret dont c’était le premier rôle, William Lubtchansky, assistant opérateur et Bernard Stora, stagiaire réalisation. Nouvelle édition augmentée en effet car feu MK2 éditions avait déjà sorti le DVD en 2010 (en partenariat avec Lobster). Ce combo édité cette fois-ci par Lobster tout seul propose, outre le film en Blu-ray permettant entre autre de mieux apprécier en 1080i (oui c’est un peu la seule réserve que l’on pourrait faire sur l’image) les extraordinaires séquences « oniriques »  couleurs, un complément totalement inédit prenant la forme de rushes jamais vues tirées des copies personnelles d’Henri-Georges Clouzot. À cette occasion, Lobster Films a fait appel à Adrien Casalis, du groupe Vimala pour composer la bande originale de ces images rares. C’est tout simplement délicieusement abstrait et permet une nouvelle forme de prolongement qui à sa manière explore plus avant les méandres de ce non film définitivement hors norme. On précisera enfin que niveau encodage son, cette édition propose sur le Blu-ray du PCM 2.0 stéréo enveloppant à souhait et sur le DVD du DD 2.0 oubliant au passage que la précédente édition DVD offrait une deuxième piste en 5.1.

Notes :

  • Image : 3,5/5
  • Son : 3,5/5
  • Bonus : 4/5

Cliquez sur les captures Blu-ray ci-dessous pour les visualiser au format HD natif 1920×1080

 

L'Enfer - Jaquette Combo Blu-ray + DVDL’Enfer d’Henri-Georges Clouzot de Serge Bromberg – Combo Blu-ray + 2 DVD – Lobster Films – Sortie le 22 mai 2017

Spécifications techniques Blu-ray :

  • Image : 1.85:1 encodée en AVC 1080/23.98p
  • Langues : Français PCM 2.0
  • Durée : 1h 35min 29s
  • 1 BD-50

Bonus (en HD) :

  • Ils ont vu l’enfer (57min 15s)
  • Les rushes du film (29min 15s)
  • Interview de Serge Bromberg (7min 05s)
  • Préface de Serge Bromberg (8min 47s)

L'Enfer - Jaquette Combo Blu-ray + DVD recto-verso

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